Assises du Numérique 2025 : cap sur une souveraineté numérique au service des citoyens et des territoires

À l’heure où les rivalités géopolitiques se renforcent, entre puissance américaine, montée en force chinoise, les Assises du Numérique se tiennent à point nommé pour façonner la trajectoire numérique de l’Europe. L’émergence fulgurante de l’IA générative, poussée notamment par les GAFAM, accentue la dépendance stratégique de l’UE aux technologies développées hors de ses frontières.  

En réunissant responsables publics, industriels, chercheurs et startups, cet événement devient un catalyseur d’alliances publiques privées : échanges de solutions concrètes, élaboration de recommandations et alignement stratégique pour consolider une autonomie européenne. 

Les Assises se distinguent par leur dimension strictement politique et territoriale. Elles offrent un espace unique où se discutent non seulement les innovations technologiques, mais aussi les trajectoires locales – des régions labellisées « smart » aux PME innovantes – sous une bannière commune : la souveraineté numérique européenne. 

L’édition 2025 des Assises du Numérique a été marquée par des interventions très inspirantes, portés par des figures de référence issues du monde scientifique, politique et technologique.  

Parmi les grands témoins, l’intervention d’Étienne Klein, physicien et directeur de recherche au CEA, a particulièrement résonné. Bien qu’il se revendique non spécialiste de l’intelligence artificielle, sa prise de recul critique a permis de rappeler les fondamentaux : face à l’accélération technologique, notamment dans l’éducation, il questionne notre dépendance croissante à des outils qui pourraient, à terme, déléguer l’exercice de la pensée critique. Son appel à ne pas sombrer dans le fatalisme européen en matière de numérique mais à retrouver une ambition scientifique forte a trouvé un écho dans l’audience. 

Côté entreprise, Corine de Bilbao, Présidente de Microsoft France, a posé un cadre structurant pour comprendre l’adoption de l’IA par les entreprises : une évolution en trois étapes — adoption, optimisation via des agents (conversationnels, actionnables, autonomes), puis innovation pour transformer les produits et solutions. Elle a rappelé que l’IA n’était plus l’apanage des grandes structures, mais devenait accessible à l’ensemble du tissu économique, y compris les PME et startups. 

L’intervention de Jean Varaldi (Qualcomm) a illustré de manière concrète comment l’IA embarquée révolutionne déjà les chaînes de valeur industrielle. En s’appuyant sur l’exemple de Qualcomm, qui produit des semi-conducteurs concurrents de Nvidia, il a mis en lumière une tendance forte : la montée en puissance de l’inférence sur le device, notamment dans les secteurs de la santé, de l’énergie ou des transports. Avec des cas d’usage comme celui d’Aramco en Arabie Saoudite, qui utilise l’IA pour automatiser la détection d’accidents ou la traduction instantanée sur ses plateformes pétrolières, Qualcomm incarne l’ancrage territorial de l’innovation numérique. 

Au-delà des keynotes, les ateliers collaboratifs du premier jour ont été un véritable catalyseur de réflexion collective. Des thématiques telles que l’IA et le quantique, l’expérience salarié/clients, la santé ou encore le droit ont permis de croiser les expertises entre participants, renforçant l’idée d’une filière numérique européenne fondée sur la complémentarité des usages. 

Le deuxième jour a, quant à lui, donné une place importante aux enjeux de société.  
Une table ronde emblématique a ouvert un débat essentiel : quelle place pour les femmes dans l’IA ? Animée par des profils engagés comme Amel Kefif (Akkodis) ou Barbara Thomas-David (Notaires au féminin). Elle a mis en lumière l’impact des biais de genre et les représentations sociales autour de l’argent et du pouvoir dans les carrières liées à l’IA. Elisabeth Moreno (Présidente de la Fondation Femmes@numérique et ancienne ministre déléguée à l’Égalité femmes-hommes, à la Diversité et à l’Égalité des chances.) a livré un message de cohésion concernant le progrès technologique lors d’une keynote dédiée au monde numérique. 

D’autres prises de parole ont porté sur les enjeux de e-réputation et de lutte contre les fake news produites par l’IA générative, ou encore sur la nécessité d’un écosystème numérique européen fort, défendue par Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l’IA et du Numérique, sous le haut patronage du Président de la République française.  Cette dernière a clôturé les Assises en rappelant que, si la France dispose déjà d’un écosystème dynamique, elle doit encore renforcer sa résilience, sa capacité d’innovation et sa souveraineté pour rester dans la course face aux États-Unis et à la Chine.